la France devient le seul pays au monde à tous les interdire


“Etne bombardez pas”, titrait à l’unisson la presse française contre la récente décision de la Cour de justice des Communautés européennes interdisant les dérogations accordées par les États membres pour certains pesticides, même s’ils sont interdits. Saisi par le Conseil d’Etat belge, saisi par des ONG anti-pesticides contestant les dérogations accordées par Bruxelles à plusieurs substances néonicotinoïdes pour le traitement de certaines semences de cultures, la Cour européenne a jugé : secteur – dans le cas de la France, la betterave sucrière.

Lever l’interdiction… Quatre jours seulement après cette décision, la France a jeté l’éponge le 23 janvier par la voix de son ministre de l’Agriculture Marc Fesno. “Je n’ai pas l’intention de promener des agriculteurs inquiets”, a déclaré le ministre. point de presse, annonçant que le gouvernement ne proposera pas d’écart dans la couverture des semences de betteraves pour la troisième année. L’explosion pour les plantations françaises, dont les récoltes se sont effondrées en 2020, a été détruite à hauteur de 70 % en raison d’une épidémie de jaunisses apportée par les pucerons, contre laquelle elles n’avaient pas le droit de lutter. La production sucrière française s’est effondrée de moitié.

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Néonicotinoïde autorisé en Europe… d’ici 2033

Mais la France devait-elle vraiment “se plier face à Bruxelles”, comme l’exécutif l’a laissé entendre en un mot avec une extrême gêne ? Selon les faits, non. En fait, en transposant les règles européennes, la France s’est mise dans une impasse et se retrouve aujourd’hui dans cette situation grotesque. alors que tous les pays du monde, y compris ses voisins, pourront s’asperger de néonicotinoïdes en 2023. la récolte de betteraves, il sera le seul à apparaître sans la moindre alternative. “C’est une grande victoire pour les écologistes. accueille l’ONG Générations Futures.

Un grand gain, surtout pour les concurrents commerciaux de la filière française, la France reste toujours le premier producteur européen de sucre. “Nos concurrents pourront pulvériser de l’acétamipride, un néonicotinoïde qui n’a pas été interdit en Europe et dont l’usage a même été prolongé jusqu’en 2033”, conclut Frank Sander. “La France va simplement ouvrir son chéquier pour indemniser les agriculteurs. Je vous dis honnêtement. Je suis fou”, siffle le président de la Confédération générale des planteurs de betteraves (CGB).

Pour comprendre comment la France est tombée dans ce piège, il faut remonter quelques années en arrière.

Surtranspositions. quand la France fait des excès de zèle

En ayant un rôle notable dans le déclin des colonies d’abeilles en Europe, comme le varroa (première cause de mortalité des ruches) ou le frelon asiatique, les insecticides de la famille des néonicotinoïdes, qui s’attaquent au système nerveux des insectes, ont fait l’objet d’une vigoureuse campagne d’opposition des ONG environnementales depuis plus de vingt ans. : Depuis le début des années 2000, la première substance de cette famille, l’imidaclopride, a été progressivement bannie des cultures de tournesol puis de maïs, après qu’il s’est avéré nocif pour les abeilles butinant sur les fleurs. D’autres médicaments (thiaméthoxame et clothianidine) sont à l’étude, momentanément suspendus, puis réintroduits…

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Enfin, en 2013, la Commission européenne a décidé de suspendre pour deux ans trois insecticides de la famille des néonicotinoïdes, étant donné que le risque pour les abeilles ne pouvait être « exclu », sauf pour certaines catégories de cultures comme la betterave ; la plante n’attire pas. les abeilles car elle est récoltée avant l’apparition des fleurs. Mais la France a alors décidé d’aller plus loin. pour persuader les militants, la ministre de l’environnement de l’époque, Ségolène Royal, et sa secrétaire d’État à la biodiversité, Barbara Pompilly, ont voté en 2015 une loi de “reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages”, interdisant toutes les substances de la famille des néonicotinoïdes, qui étaient alors utilisées en France sans considération de toxicité pertinente.

L’interdiction prend effet en 2018, avec la possibilité d’une dérogation à l’interdiction dans certaines circonstances jusqu’en 2020. Au total, cinq substances sont définitivement interdites (mais elles sont autorisées pour les colliers anti-puces pour animaux de compagnie – très élevé). Le Parlement européen n’en interdira que trois en 2018, les cultures de plein air uniquement, puis une quatrième… Mais l’acétamipride, un néonicotinoïde considéré comme bien moins toxique au contact que la clothianidine, par exemple, reste autorisé. , et sa confirmation le sera même. prolongée en Europe jusqu’en… 2033

2020 : Choc dû au virus jaune de la betterave

En 2020, alors que les pucerons envahissaient les cultures françaises et que les jaunisses décimaient les cultures, le ministre de l’Agriculture Julien Denormandier n’a renoncé à l’utilisation des néonicotinoïdes pour les betteraviers que pendant trois ans, au détriment des scientifiques pour trouver des alternatives pour lutter contre le ravageur. La loi prévoit un cadre strict. Premièrement, le matériau ne peut être utilisé que comme enrobage de semences, ce qui permet de réduire sa propagation dans l’environnement. Ensuite, parce que les néonicotinoïdes persistent dans le sol pendant une quinzaine de mois, il est interdit aux agriculteurs de planter des cultures à fleurs pendant les deux années suivantes. “En gros, on ne peut semer que du blé, de l’orge ou de l’avoine”, explique Christophe Boizard, qui cultive 200 hectares dans la Somme, dont 35 betteraves.

Dans le même temps, un “conseil de surveillance de la betterave” a été créé, qui réunit des parlementaires, des planteurs de betteraves, des chercheurs et des organisations environnementales pour trouver des alternatives. “Pour l’année 2023, les scientifiques pensent qu’il existe un risque de présence de pucerons à partir du 1.hein en mai, et le virus de la jaunisse est resté très présent. Alors on s’est dit qu’on donnerait un avis positif sur les nouvelles déviations », explique son président, le sénateur Pierre Luau du groupe Union centriste. Quant aux alternatives… « En trois ans, il a fallu se rendre compte que c’était mission impossible. »

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Les néonicotinoïdes sont encore utilisés en Europe

Ministre de l’Agriculture La rue de Varenne est en feu. “Nous avons décidé en 2016, sans aucune alternative connue ni programme de recherche, de tout interdire. Aujourd’hui, nous pouvons mesurer le cercle », crie-t-il Point Marc Fesno, qui rappelle que d’autres pays européens auront la possibilité d’utiliser le maudit insecticide en application foliaire sans qu’aucune association environnementale ne s’en émeuve.

L’Allemagne a fait ce choix il y a trois ans. Alors que l’enrobage des semences consiste en une protection préventive des cultures, Berlin attend pour traiter les attaques de pucerons en pulvérisant de l’acétamipride sur les plans. Le traitement à l’air libre est “beaucoup plus dangereux pour les abeilles, car le vent peut disperser la molécule vers les fleurs environnantes”, affirme Pierre Luo. Suite à l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), la plupart des pays producteurs de betteraves auront cette possibilité, créant une grave distorsion de concurrence avec les producteurs français.

Il n’y a pas encore d’alternative

Hormis le Royaume-Uni, qui n’est plus soumis à l’OMC après le Brexit et qui vient d’autoriser, après une “évaluation scientifique rigoureuse”, l’usage du néonicotinoïde interdit en 2023, la plupart des pays producteurs de l’arme (de l’Allemagne à la Pologne ). , en passant par l’Espagne, la République tchèque, la Finlande, etc.) recourra à la pulvérisation directement sur les plantes. “L’acétamiride est efficace pendant huit jours, puis il faut recommencer”, explique Frank Sander. En 2020, la France a envisagé de réviser l’interdiction de cette substance omniprésente, mais en a été empêchée, selon le ministère, “en raison du principe de non-régression du droit de l’environnement”. Néanmoins…

Les alternatives que les partisans de l’interdiction de cette famille d’insecticides promettaient à partir de 2018 ne sont pas encore disponibles. “On s’est trompé d’analyse, on s’est fié Point, en 2020, conseiller du ministre. Avant l’interdiction des néonicotinoïdes, l’Anses avait découvert l’insecticide karaté-K, qui pourrait avoir une application similaire contre les pucerons. Mais il s’est avéré que les pucerons lui étaient résistants et qu’il tuait également tous les autres insectes. “Depuis, d’autres molécules ont été confirmées à la hâte sans grand succès. “Nous faisons beaucoup de progrès en termes de connaissances sur le virus et même sur les alternatives, mais ce n’est qu’une question de temps”, a déclaré Fabien Maupass, directeur scientifique de l’Institut technique de la betterave (ITB). « Deux sociétés de biocontrôle développent des solutions à base de phéromones, ou odeurs, qui vont repousser les pucerons. Mais le concept n’a pas encore été testé dans le monde réel et rien n’est autorisé », dit-il. “Au niveau génétique, toutes les entreprises semencières ont trouvé des sources de tolérance qu’elles sont en train d’intégrer dans leur matériel. Mais cela ne se fera pas du jour au lendemain. “D’autant plus que l’Europe interdit les nouvelles biotechnologies végétales, qu’elle considère toujours comme des OGM, tous les boutures devront se faire à la main… “Au mieux, on ne sera pas tranquille avant 2026”, prévoit Fabien Maupass.

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Une solution chéquier

Christophe Boisard, lui, plantera quand même des betteraves, car il n’a pas d’autre choix. le contrat le lie à l’usine pour cinq ans, ce qui transforme sa production. “Je vais semer de l’avoine en même temps que les betteraves, une graminée qui prévient le puceron et ralentit sa transition de plante en plante”, précise-t-il. “Le problème c’est qu’à un certain stade il faut tuer l’herbe pour ne pas concurrencer les betteraves, et pour cela on utilise des désherbants…” C’est pourquoi la culture biologique de la betterave ne s’est jamais développée, occupant à peine 1 000 hectares sur les 400 000 que compte la France.

Le ministère de l’Agriculture s’est engagé à indemniser intégralement les agriculteurs pour les pertes de récolte. Cependant, des solutions pour préserver le secteur sont encore à l’étude. du fait qu’il est gorgé d’eau, il n’est pas avantageux de transporter la betterave jusqu’au site de transformation à plus de 35 km, ni en dessous d’un certain volume. “L’usine doit fonctionner pendant au moins 90 jours. Si demain les agriculteurs ont une baisse de rendement ou arrêtent la production de betteraves, on peut tous fermer”, assure, inquiet, le patron d’une des 21 sucreries du pays.

Le sucre, dont la consommation n’a pas augmenté en France et est resté parfaitement stable depuis plus de 50 ans, sera alors importé. Et si la France peut bloquer l’importation de cultures utilisant des néonicotinoïdes dans les téguments, dans les conditions précisées par la CJUE, elle ne pourra pas s’opposer au reste. Ainsi, le sucre de demain viendra peut-être d’Allemagne, d’Espagne, de Pologne, voire de Belgique… Ou des immenses champs de canne à sucre du Brésil ou de Thaïlande, où de grandes quantités de néonicotinoïdes sont utilisées. « Où est la logique, où est le bénéfice pour l’environnement ? demande Frank Sander. “Les chômeurs ne comptent plus, et l’économie cède la place aux préoccupations environnementales”, déplore un proche de l’industrie. “Nous sommes évidemment entrés dans une tendance à la baisse. »


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